L’identification des outils d’anticipation disponibles pour la commune, de leurs modes d’accès et la compréhension de leur fonctionnement est primordiale. Cela permet de réfléchir à la façon dont on peut anticiper la survenance d’un phénomène générant des inondations sur le territoire communal et d’estimer le délai d’anticipation que la prévision ou l’observation peuvent donner. Ces informations sont indispensables pour bâtir la réponse opérationnelle. Ce travail peut être mené en parallèle du diagnostic du risque inondation.
Une fonction de veille continue doit être mise en place dans la commune. Il s’agit d’être en mesure de réceptionner, évaluer et retransmettre tous avertissements, toutes informations ou alertes provenant des divers canaux et ce en toutes circonstances (heures ouvrables/non ouvrables, semaine/week-end). Cette fonction n’est pas spécifique au risque inondation, c’est une des bases de l’organisation d’un PCS.
Le panel des informations liées à l’anticipation des phénomènes mis à disposition des autorités de police (maires et préfets), responsables de la gestion de la crise, s’est considérablement enrichi ces dernières années. Ces informations sont délivrées par divers dispositifs. Seuls les outils portés par les services publics sont présentés dans ce document :
Attention, il existe un risque important de confusion entre les différentes cartes de vigilance que l'on peut trouver sur internet. Au-delà de la vigilance officielle produite par Météo-France et le réseau Vigicrues, des sites de météo amateurs peuvent produire leur propre carte de vigilance selon des critères et une expertise qui ne sont pas clairement définis. Il existe aussi des sites de météo qui produisent automatiquement des "vigilances" sans aucune expertise humaine. Si la consultation de ces sites peut être intéressante car elle peut donner une idée de l'incertitude de la prévision et des différents scénarios possibles, il faut savoir comprendre et interpréter leurs productions. En termes de responsabilité des acteurs de la gestion de crise, il faut rappeler que la consultation des vigilances officielles produites par Météo-France et Vigicrues doivent rester la base de l'anticipation des phénomènes météorologiques.
Certains de ces dispositifs sont en accès libre au grand public, tels que les vigilances météorolo-giques de Météo-France ou VigiCrues, d’autres, comme APIC ou VigiCrues Flash, sont réservés aux acteurs institutionnels (État, collectivités et services de secours). Pour ces deux derniers outils, il est nécessaire que la commune se crée un compte en se connectant à la plateforme APIC (https://apic.meteo.fr/) pour savoir si elle est éligible. En fonc-tion du résultat, la commune peut paramétrer son abonnement gratuit à ces services.
« Prévision et anticipation des crues et des inondations » Les guides du Centre Européen de Prévention du Risque Inondation (CEPRI) : http://www.cepri.net/actualites/items/Guide_prevision.html.
Guide Méthodologique : conception et mise en œuvre d’un système d’alerte local aux crues (http://www.auvergne-rhone-alpes.developpement-durable.gouv.fr/conception-et-mise-en-oeuvre-d-un-systeme-d-a16315.html).
Site internet Météo-France (http://www.meteofrance.com/).
Consultation des données et informations des stations hydrométriques :
- stations en dehors des tronçons surveillés par VigiCrues mais accessibles sur les onglets des SPC du site internet VigiCrues (https://www.vigicrues.gouv.fr/) ;
- réseau Hydroréel : serveur de données hydrométriques en temps réel sur le bassin Rhône-Méditerranée et la région Auvergne-Rhône–Alpes (https://www.rdbrmc.com/hydroreel2/index.php).
Certains opérateurs privés peuvent également utiliser ces données pour apporter du conseil, une assistance à l’analyse du risque et à l’interprétation du phénomène ou une aide à la prise de décision pour les collectivités.
Une bonne exploitation de ces outils suppose donc d’être à la fois capable de comprendre les notions techniques sur lesquelles ils se basent, de savoir trier parmi les informations disponibles celles utiles en fonction de ses besoins et aussi d’être en mesure d’exploiter les informations implicites qu’ils apportent. Cette capacité peut être interne à la commune ou mutualisée (syndicats, EPCI...).
> S’APPROPRIER LES PRINCIPES FONDAMENTAUX DES VIGILANCES
La carte de vigilance météorologique matérialise selon un code couleur, à quatre niveaux d’intensité croissante (vert, jaune, orange et rouge), la dangerosité des phénomènes potentiels attendus.
Les couleurs utilisées par les dispositifs institutionnels de vigilance (Météo-France ou Vigicrues) sont souvent reprises comme « références » de graduation du risque par d’autres acteurs, mais sur la base de seuils qui leur sont propres. Il faut donc faire attention de bien distinguer l’origine des informations, selon qu’elles proviennent de sites officiels de vigilance ou d'autres sources.
La carte n’est que la synthèse forcément réductrice d’une prévision détaillée dans les bulletins de suivi associés. La définition des niveaux de vigilance et la représentation départementale de la carte ont été conçues pour optimiser la réponse des services en charge de la sécurité civile aux niveaux départemental et national. Le niveau orange correspond ainsi à une mobilisation possible de moyens à l’échelle du département et le rouge à une mobilisation de moyens extradépartementaux. Ce n’est donc pas une échelle communale de risque. Des conséquences significatives peuvent avoir lieu localement dès la vigilance jaune.
Il en est de même pour VigiCrues qui affiche des niveaux en fonction des conséquences déterminées pour des tronçons qui couvrent plusieurs communes. Ainsi, pour une même couleur annoncée sur un tronçon, les conséquences d’une commune à l’autre peuvent être très variables. De même à l’échelle d’une commune pour un même niveau de couleur du tronçon, les conséquences peuvent être très différentes selon l’intensité de la crue.
Il est nécessaire de se construire une échelle locale de référence du risque inondation. Il peut y avoir des conséquences locales dès le niveau de vigilance jaune.
> ACCÉDER AUX INFORMATIONS LES PLUS PERTINENTES
La lecture des dispositifs de vigilance uniquement axée sur les niveaux de couleur n’est pas suffisante pour gérer un évènement. Les cartes sont la représentation la plus synthétique des informations de prévision. Elles sont destinées à faciliter les échanges et la communication. Pour une gestion opérationnelle, il est nécessaire de consulter les sites internet pour accéder aux données (prévues ou observées) les plus précises. Ces informations sont accessibles sous différentes formes, notamment des bulletins de suivi actualisés régulièrement (dès le niveau jaune pour VigiCrues et dès le niveau orange pour la météorologie) ainsi que des prévisions graphiques.
Pour avoir des informations « techniques » de prévision plus pertinentes pour anticiper et gérer un évènement au niveau local, il faut consulter systématiquement les bulletins de suivi associés aux cartes.
> DISTINGUER LES NOTIONS DE VIGILANCE ET D’ALERTE
La vigilance est un état de veille et de suivi. Elle constitue un avertissement qui permet d’attirer l’attention sur l’occurrence probable de phénomènes potentiellement dangereux sur une zone donnée et de permettre de se mettre en situation de réagir de manière appropriée si le danger se précise. Ce principe est valable pour tout le monde, gestionnaire de crise ou population. Pour les préfets, la circulaire du 3 octobre 2011 relative à la procédure de vigilance et d'alerte météorologiques (complétée par l’instruction interministérielle du 11 juin 2014 relative à la mise en œuvre de la procédure de vigilance crues) précise pour la mise en vigilance orange que « des phénomènes dangereux peuvent se produire. Néanmoins, le dispositif à mettre en œuvre peut être précédé d’une période de veille et/ou de la mise en place progressive d’actions conformément aux dispositions ORSEC. ». Ainsi dans ce cas-là, les préfectures doivent procéder à l’analyse de la situation basée sur les données techniques de prévision, vérifier la disponibilité effective des services placés sous astreinte et si nécessaire procéder à l’alerte des acteurs pertinents (services opérationnels, maires...) pour qu’ils mettent en œuvre les actions relevant de leurs domaines de compétences.
Dans le cadre d’une vigilance, une alerte transmise par la préfecture aux maires a comme objectif de les faire passer d’un mode de veille courant à une posture de suivi opérationnel. Le but est que les communes surveillent l’évolution du phénomène et se préparent à agir selon les besoins en fonction de leur analyse menée à partir des connaissances locales du risque, des informations techniques de prévision et de leurs observations de terrain. Cette posture de suivi opérationnel peut être déclenchée par la commune de sa propre initiative, sans attendre une alerte transmise par le préfet, en fonction du contexte local (par exemple pour certaines communes dès la vigilance jaune).
L’alerte des gestionnaires de crise doit être distinguée de l’alerte des populations qui est définie dans le Guide ORSEC G4 – alerte et information des populations de 2013. L’alerte des populations « consiste en la diffusion, par les autorités compétentes (Maire ou Préfet) et en phase d’urgence, d’un signal destiné à avertir des individus d’un danger, imminent ou en train de produire ses effets, susceptible de porter atteinte à leur intégrité physique et nécessitant d’adopter un comportement réflexe de sauvegarde. »
La vigilance n'est pas une alerte, elle indique la forte probabilité de survenue d'un évènement et appelle les différents acteurs à se mettre dans une posture de vigilance en surveillant régulièrement l'évolution des phénomènes au moyen des bulletins de suivi de la vigilance et des données d'observation. Ainsi dans le cadre des bulletins de vigilance météorologique, le changement de couleur ne correspond pas à une alerte de la population par les autorités, mais à une diffusion d’information par Météo-France. C’est ensuite aux maires et préfets qu’il revient de décider des actions à réaliser en fonction du contexte local du risque inondation : information ou déclenchement si nécessaire d’une alerte des populations exposées.
> DISTINGUER LES PICTOGRAMMES « PLUIE-INONDATION » PUIS « INONDATION » DE LA CARTE DE VIGILANCE MÉTÉOROLOGIQUE
La couleur du département pour la carte de vigilance météorologique dans le cas du phénomène de « pluie-inondation » résulte d’une analyse conjointe des risques de « fortes précipitations » par Météo-France et des risques de « crues » par VigiCrues.
Le pictogramme « inondation » indique quant à lui que le département n’est pas ou plus concerné par le risque de fortes pluies mais uniquement par celui d’inondation.
> COMPRENDRE LES APPORTS DE VIGICRUES À L’ÉCHÉANCE DE 24 H
La carte de VigiCrues, point d’entrée du dispositif de prévision des crues, synthétise l’information sur les cours d’eau surveillés. La même représentation graphique pour tous les tronçons peut laisser sous-en-tendre que le phénomène inondation est unique et homogène et que l’information disponible est de même nature quel que soit le cours d’eau. Or, il n’en est rien, les possibilités d’anticipation sont très variables selon les capacités techniques de prévision liées aux types d’inondation, lente ou rapide. Ainsi, une mise en vigilance pour les 24 heures à venir n’a pas la même signification selon la cinétique de réaction du cours d’eau :
Pour gérer les incertitudes, il est possible de prévoir une réponse graduée en fonction à la fois des informations d’anticipation disponibles et du contexte communal du risque. Cela revient à définir des seuils de déclenchement des actions du dispositif propres au territoire.
> EXPLOITER VIGICRUES POUR LES INONDATIONS À CINÉTIQUE RAPIDE
La vigilance porte uniquement sur les lits majeurs des cours d’eau surveillés. Elle ne prend pas en compte les têtes de bassin, les affluents et les phénomènes de ruissellement associés.
Pour les cours d’eau à cinétique rapide, cela génère souvent des incompréhensions sur les prévisions, car les personnes sont surprises par la dynamique de l’inondation. En effet, les inondations débutent souvent sur des zones non surveillées (têtes de bassins ou petits affluents) ou par des phénomènes non pris en compte de ruissellements généralisés entrainant les débordements des ruisseaux, des cours d’eau intermittents, des réseaux d’évacuation de pluie ou d’assainissement avant de se poursuivre par la montée des eaux et le débordement du cours d’eau « principal », objet de la surveillance du Service de Prévision des Crues.
La mise en vigilance d’un tronçon surveillé à cinétique rapide doit être interprétée comme une indication de risque de crue des autres « petits » cours non surveillés du bassin versant associé à ce tronçon.
Chaque dispositif apporte des informations par rapport à un ou plusieurs phénomènes et à différentes échelles géographiques ou temporelles. Météo-France est le premier contributeur à l’identification et la qualification des phénomènes hydrométéorologiques.
L’exploitation complémentaire et croisée des outils doit aider à identifier le phénomène hydrologique potentiel auquel le territoire communal peut être confronté, par exemple :
Pour les inondations à cinétique très rapide sur des petits bassins versants, hormis les systèmes d’alerte locaux, les autres dispositifs ne sont que des indicateurs du risque. Seule une surveillance locale est en capacité d’établir la concrétisation ou non du phénomène.
> SE CONSTRUIRE UNE ÉCHELLE LOCALE DU RISQUE
La lecture des dispositifs d’anticipation uniquement axée sur les niveaux de couleur n’apporte pas une information suffisante pour répondre aux besoins de gestion de crise au niveau local. Le diagnostic des risques doit permettre de prévoir une échelle communale du risque.
Cette échelle doit s’appuyer sur des points d’observation locaux, agissant sur le même principe que les données de hauteurs ou de débits diffusées par les stations de référence des cours d’eau instrumentés. Ces points d’observation, basés sur des repères « physiques » doivent permettre d’analyser visuellement et rapidement la situation. Ils doivent être préparés, réfléchis et définis en prenant en compte plusieurs facteurs :
Pour les phénomènes de ruissellement ou d’inondation rapide, il est important d’avoir des repères locaux par rapport à la pluviométrie moyenne ou extrême sur le territoire. Pour cela il est intéressant de consulter le site « Pluies extrêmes » de Météo France : http://pluiesextremes.meteo.fr
> PRÉPARER LA MONTÉE EN PUISSANCE DE L’ORGANISATION
L’exploitation des outils de prévision doit permettre une montée en puissance de l’organisation communale et ainsi sortir d‘une logique de tout ou rien. La commune peut adapter sa posture en fonction de ses risques et des informations délivrées.
Elle peut notamment décider de mettre en place un dispositif de surveillance de terrain, se renseigner en contactant des communes situées en amont ou surveiller les réseaux sociaux.
EXEMPLE DE MONTÉE EN PUISSANCE DE L’ORGANISATION COMMUNALE | |||
Informations disponibles | Posture communale | Qui évalue la situation | Actions liées à l’organisation interne |
Flux continu courant | Veille | Personne assurant la permanence |
|
Identification d’une situation potentielle à risque à suivre (Vigilance météo ou crues de niveau jaune ou supérieur, alerte de la préfecture ou identification locale par la veille) | Suivi | Personne assurant la permanence + consultation du maire et noyau dur du PCC* |
|
Précision sur l’impact potentiel sur le territoire communal Faisceau convergent d’informations Situation particulière (manifestation...) |
Pré-alerte | Noyau dur PCC* |
|
Confirmation de l’impact sur le territoire ou premier débordement dans certaines zones | Mobilisation | Noyau dur ou PCC |
|